La Liberté, Fribourg, 13 février 2015

Pas de monopole du génocide (1)

     Le centenaire du génocide arménien est commémoré cette année. Le DFAE ne veut pas que les diplomates aperçoivent le discret monument projeté à Genève: de simples lampadaires. Les massacres de 1915 et 1923 n’étaient pas nouveaux. Le journaliste Dillon parlait déjà en 1895 de «franche extermination». L’horreur a simplement culminé en 1915. Un ou deux millions d’habitants massacrés, violés, égorgés.

     Les tortionnaires sont inventifs. Pour éliminer les Indiens, les Américains avaient déplacé plusieurs nations (Cherokee, Choctaw, etc.) vers les marécages de la Floride où les survivants du «Trail of Tears» pourrirent. Les Ottomans utilisèrent ce modèle pour éradiquer les Arméniens qui n’avaient pas été massacrés sur place: ce fut le supplice de la terrifiante marche vers Deir ez-Zor dans le désert syrien. Ils eurent aussi l’idée de confiner des prisonniers dans des wagons laissés au soleil; la recette sera reprise par les Roumains pour décimer les Juifs de Iasi.

     Certains cherchent à camoufler l’évidence. Mais quand on regarde des atlas du XIXe s., on voit les anciens pays de l’Empire ottoman: Syrie, Irak, Arménie, etc.; ceux-là, devenus indépendants, perdurent; celle-ci, autrefois immense, a disparu - excepté un petit territoire enclavé dans le Caucase. Le reste du pays est rayé des cartes: population anéantie, langue bannie, églises détruites.

    Après la Shoah, les Juifs ont fait construire de nombreux monuments devant lesquels les dirigeants européens font périodiquement pénitence. Il ne devrait pas y avoir de monopole du génocide. Acceptons les khatchkar de la mémoire (en arménien, stèle de pierre représentant une croix) (2).

     Pierre Perroud

     (1) Titre de la Rédaction.

 

 

     Voir aussi à Athena: E. Noguères, Arménie, éd. 1897

 

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