ATHENA. Pierre Peroud. Un déni de démocratie

La Liberté, Fribourg, 17 février 2016

Un déni de démocratie (1)

     Chantage au village. Le contenu d’un tract électoral contenant une condition étonnante surprend ce lecteur.

     Dans un récent article, le 20 janvier, «La Liberté» a analysé avec humour les dénominations des listes électorales. C’était divertissant et cela m’a incité à lire quelques brefs programmes de législature. Tantôt on est pour la station d’épuration, ce qui est inévitable, tantôt pour le village, ce qui est vague, tantôt pour l’avenir, ce qui est le comble du programme vierge.

     Un tract grinçant a retenu mon attention: «De notre côté, nous sommes unanimes: si l’un d’entre nous n’est pas élu, les quatre autres renonceront à leur élection.» Peu importe que cela se passe à Piogre ou à Landernau, ce menaçant aveu de faiblesse est choquant: d’une part, c’est un déni de démocratie, contraire à nos traditions suisses de compromis et de consensus; d’autre part, le texte omet curieusement de dire «l’un ou l’une» comme si les femmes n’étaient que des faire-valoir.

    On a l’impression d’être à Pyongyang, Kiev ou Riyad où il faut montrer «patte noire» pour ne pas être stigmatisé. Comment peut-on se présenter à une élection, chez nous en Suisse, en avertissant qu’on n’acceptera pas le résultat s’il ne nous est pas «totalitairement» favorable? C’est irresponsable d’annoncer aux électeurs qu’on leur fera un bras d’honneur s’ils ne votent pas en bloc pour le parti unique.

     Dans «La Condition humaine», Malraux évoque ceux qui veulent le pouvoir pour le pouvoir, pour leur bon plaisir, au lieu d’accéder au trône pour gouverner, c’est-à-dire travailler avec équité pour la communauté, qu’il s’agisse des proches ou des antagonistes. Ce passage de «La Condition humaine» offre un sujet de réflexion même dans les petits royaumes.

Pierre Perroud

(1) Titre et commentaires de la Rédaction.

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