Athena s'apprêtant à écrire
Athena getting ready to write

A T H E N A


 

Largillière/P.P.
Nicolas de Largillière: Portrait de Voltaire (détail)
Institut et Musée Voltaire, Genève, CH.
 

VOLTAIRE

(1694 - 1778)

LE
POËME
SUR LA
BATAILLE
DE
FONTENOY,
Gagnée par
LOUIS XV.
Le 11. May 1745.

(éd. 1748, à Amsterdam - coll. P.P.)
(Orthographe de l'édition respectée)

    Numérisation rtf: Aurélia Ionta & Matylda Kleczkowski
    Version html à ATHENA.

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AU ROY.

SIRE,

     Je n'avois osé dédier à VOTRE MAJESTÉ les premiers essais de cet Ouvrage. Je craignois sur-tout de déplaire au plus modeste des Vainqueurs; mais, SIRE, ce n'est point ici un Panégyrique, c'est une peinture fidèle d'une partie de la Journée la plus glorieuse depuis la Bataille de Bovines. Ce sont les sentimens de la France, quoiqu'à peine exprimés; c'est un Poëme sans exagération, & de grandes vérités, sans mélange de fiction ni de flaterie. Le nom de VOTRE MAJESTÉ fera passer cette faible esquisse à la postérité, comme un Monument autentique de tant de belles actions, faites en votre presence, à l'exemple des vôtres.
     Daignez,
SIRE, ajoûter à la bonté que VOTRE MAJESTÉ a euë de permettre cet hommage, celle d'agréer les profonds respects d'un de vos moindres Sujets, & du plus zèlé de vos admirateurs.
     
VOLTAIRE.

DISCOURS
PRÉLIMINAIRE.

     Le Public fait que cet Ouvrage, composé d'abord avec la rapidité que le zèle inspire, reçut des accroissemens à chaque Edition qu'on en faisoit. Toutes les circonstances de la Victoire de Fontenoy qu'on apprenoit à Paris de jour en jour, méritoient d'être célébrées; &, ce qui n'étoit d'abord qu'une Piéce de cent Vers, est devenu un Poëme qui en contient plus de trois cent quarante; mais on y a gardé toujours le même ordre, qui consiste dans la Préparation, dans l'action, & dans ce qui la termine; on n'a fait même que mettre cet ordre dans un plus grand jour; en traçant dans cette Edition le portrait des Nations dont étoit composée l'Armée Ennemie, & en spécifiant leurs trois attaques.
     On a peint avec des traits vrais, mais non injurieux, les Nations dont LOUIS XV a triomphé: par exemple, quand on dit des Hollandais qu'ils avoient autrefois brisé le joug de l'Autriche cruelle, il est clair que c'est de l'Autriche, alors cruelle envers eux, que l'on parle: car assurément elle ne l'est pas aujourd'hui pour les Etats-Généraux; & d'ailleurs , la Reine de Hongrie qui ajoute tant à la gloire de la Maison d'Autriche, sait combien les Français respectent sa Personne & ses vertus, en étant forcés de la combattre.
     Quand on a dit des Anglais: Et la Férocité le céde à la Vertu, on a eu soin d'avertir en Nottes dans toutes les Editions, que ce reproche de férocité ne tomboit que sur le Soldat.
     En effet, il est très-véritable que lorsque la colonne Anglaise déborda Fontenoy, plusieurs Soldats de cette Nation criérent: No quarter, point de quartier.On sait encore, que quand M. de Sechelles seconda les intentions du Roi, avec une prévoïance si singuliére, & qu'il fit préparer autant de secours pour les Prisonniers Ennemis blessés, que pour nos Troupes, quelques Fantassins Anglais s'acharnérent encore contre nos Soldats, dans les Chariots même où l'on transportoit les vainqueurs & les vaincus blessés. Les Officiers qui ont par-tout à peu près la même éducation dans toute l'Europe, ont aussi la même générosité; mais il y a des Païs où le Peuple, abandonné à lui-même, est plus farouche qu'ailleurs.On n'en a pas moins loüé la valeur & la conduite de cette Nation; & sur-tout on n'a cité le nom de M. le Duc de Cumberland, qu'avec l'éloge que sa magnanimité doit attendre de tout le monde.
     Quelques Etrangers ont voulu persuader au Public que l'illustre Adisson, dans son Poëme de la Campagne de Hochsted, avoit parlé plus honorablement de la Maison du Roi, que l'Auteur même du Poëme de Fontenoy. Ce reproche a été cause qu'on a cherché l'Ouvrage de M. Adisson à la Bibliotéque de Sa Majesté, & on a été bien surpris d'y trouver beaucoup plus d'injures que de loüanges, c'est vers le trois centiéme Vers. On ne les répétera point, & il est bien inutile d'y répondre; la Maison du Roi leur a répondu par des victoires. On est très-éloigné de refuser à un grand Poëte & à un Philosophe très-éclairé, tel que M. Adisson, les éloges qu'il mérite; mais il en mériteroit davantage, & il auroit plus honoré la Philosophie & la Poësie, s'il avoit plus ménagé dans son Poëme des Têtes couronnées, qu'un ennemi même doit toujours respecter, & s'il avoit songé que les loüanges données aux vaincus, sont un laurier de plus pour les vainqueurs: il est à croire que quand M. Adisson fut Secrétaire-d'Etat, le Ministre se repentit de ces indécences échapées à l'Auteur.
     Si l'Ouvrage Anglais est trop rempli de fiel, celui-ci respire l'humanité. On a songé, en célébrant une Bataille, à inspirer des sentimens de bienfaisance. Malheur à celui qui ne pourrait se plaire qu'aux peintures de la destruction, & aux images des malheurs des hommes.
     Les Peuples de l'Europe ont des principes d'humanité, qui ne se trouvent point dans les autres parties du monde; ils sont plus liés entr'eux; ils ont des loix qui leur sont communes; toutes les Maisons des Souverains sont alliées; leurs Sujets voïagent continuellement & entretiennent une liaison réciproque. Les Européens Chrétiens sont ce qu'étoient les Grecs; ils se font la guerre entr'eux, mais ils se conservent dans ces dissentions d'ordinaire, tant de bienséance & de politesse, que souvent un Français, un Anglais, un Allemand qui se rencontrent, paraissent être nez dans la même Ville. Il est vrai que les Lacédémoniens & les Thébains étoient moins polis que le peuple d'Athènes; mais enfin toutes les Nations de la Grèce se regardoient comme des Alliés, qui ne se faisoient la guerre que dans l'espérance certaine de la paix: ils insultoient rarement à des ennemis qui dans peu d'années devoient être leurs amis. C'est sur ce principe qu'on a tâché que cet ouvrage fût un monument de la gloire du Roi, & non de la honte des Nations dont il triomphe: on seroit fâché d'avoir écrit contre elles avec autant d'aigreur, que quelques Français en ont mis dans leurs satyres contre cet ouvrage d'un de leurs compatriotes; mais la jalousie d'Auteur à Auteur, est beaucoup plus grande que celle de Nation à Nation.
     On a dit des Suisses, qu'ils sont nos antiques Amis & nos Concitoïens, parce qu'ils le sont depuis deux cens cinquante ans. On a dit que les étrangers qui servent dans nos Armées, ont suivi l'exemple de la Maison du Roi & de nos autres troupes, parce qu'en éfet, c'est toujours à la Nation qui combat pour son Prince à donner cet exemple, & que jamais cet exemple n'a été mieux donné.
     On n'ôtera jamais à la Nation Française la gloire de la valeur & de la politesse. On a osé imprimer que ce vers,

     Je vois cet Etranger qu'on croit né parmi nous.

étoit un compliment à un Général né en Saxe, d'avoir l'air Français. Il est bien question ici d'air & de bonne grace! Quel est l'homme qui ne voit évidemment que ce vers signifie que ce Général étranger est aussi attaché au Roi que s'il étoit né son Sujet?
     Cette critique est aussi judicieuse que celle de quelques personnes qui prétendirent qu'il n'étoit pas honnête de dire que ce Général étoit dangereusement malade, lorsqu'en éfet son courage lui fit oublier l'état douloureux où il étoit réduit, & le fit triompher de la faiblesse de son corps ainsi que des ennemis du Roi.
     Voilà tout ce que la bienséance en général permet qu'on réponde à ceux qui en ont manqué.
     L'Auteur n'a eu d'autre vûë que de rendre fidèlement ce qui étoit venu à sa connaissance, & son seul regret est de n'avoir pû, dans un si court espace de tems, & dans une piéce de si peu d'étenduë, célébrer toutes les belles actions dont il a depuis entendu parler; il ne pouvoit dire tout, mais au moins ce qu'il a dit est vrai; la moindre flaterie eût deshonoré un ouvrage fondé sur la gloire du Roi & sur celle de la Nation. Le plaisir de dire la vérité l'occupoit si entiérement, que ce ne fut qu'après six Editions, qu'il envoïa son Ouvrage à la plûpart de ceux qui y sont célébrés.
     Tous ceux qui sont nommés n'ont pas eu les occasions de se signaler également. Celui qui, à la tête de son Régiment attendoit l'ordre de marcher, n'a pû rendre le même service qu'un Lieutenant-Général qui étoit à portée de conseiller de fondre sur la colonne Anglaise, & qui partit pour la charger avec la Maison du Roi. Mais si la grande action de l'un mérite d'être rapportée, le courage impatient de l'autre ne doit pas être oublié. Tel est loué en général sur sa valeur, tel autre sur un service rendu; on a parlé des blessures des uns, on a déploré la mort des autres.
     Ce fut une justice que rendit le célèbre M. Despréaux à ceux qui avoient été de l'expédition du passage du Rhin. Il cite près de vingt noms; il y en a ici plus de soixante, & on en trouveroit quatre fois davantage si la nature de l'Ouvrage le comportoit.
     Il seroit bien étrange qu'il eût été permis à Homére, à Virgile, au Tasse, de décrire les blessures de mille Guerriers imaginaires, & qu'il ne le fût pas de parler des Héros véritables qui viennent de prodiguer leur sang, & parmi lesquels il y en a plusieurs avec qui l'Auteur avoit eu l'honneur de vivre, & qui lui ont laissé de sincéres regrets.
     L'attention scrupuleuse qu'on a aportée dans cette Edition, doit servir de garant de tous les faits qui sont énoncés dans le Poëme. Il n'en est aucun qui ne doive être cher à la Nation, & à toutes les familles qu'ils regardent. En éfet, qui n'est touché sensiblement en lisant le nom de son fils, de son frére, d'un parent cher, d'un ami tué ou blessé, ou exposé dans cette Bataille, qui sera célèbre à jamais; en lisant, dis-je, ce nom dans un Ouvrage, qui tout faible qu'il est, a été honoré plus d'une fois des regards du Monarque, & que Sa Majesté n'a permis qu'il lui fut dédié, que parce qu'Elle a oublié son éloge en faveur de celui des Officiers qui ont combattu & vaincu sous ses ordres.
     C'est donc moins en Poëte qu'en bon Citoïen qu'on a travaillé. On n'a point cru devoir orner ce Poëme de longues fictions, surtout dans la premiére chaleur du Public, & dans un tems où l'Europe n'étoit occupée que des détails intéressans de cette victoire importante, achetée par tant de sang.
     La fiction peut orner un sujet, ou moins grand ou moins intéressant, ou, qui placé plus loin de nous, laisse l'esprit plus tranquile. Ainsi, lorsque Despréaux s'égaïa dans sa description du passage du Rhin, c'étoit trois mois après l'action; & cette action, toute brillante qu'elle fut, n'est à comparer ni pour l'importance, ni pour le danger, à une Bataille rangée, gagnée sur un Ennemi habile, intrepide & supérieur en nombre, par un Roi exposé, ainsi que son Fils, pendant quatre heures au feu de l'artillerie.
     Ce n'est qu'après s'être laissé emporter aux premiers mouvemens de zèle, après s'être attaché uniquement à louer ceux qui ont si bien servi la Patrie dans ce grand jour, qu'on s'est permis d'insérer dans le Poëme un peu de ces fictions qui affaibliroient un tel sujet si on vouloit les prodiguer; & on ne dit ici en prose, que ce que M. Adisson lui-même a dit en vers dans son fameux Poëme de la Campagne d'Hochsted.
     On peut deux mille ans après la guerre de Troïe, faire apporter par Vénus à Enée des Armes que Vulcain a forgées, & qui rendent ce Héros invulnérable; on peut lui faire rendre son Epée par une Divinité, pour la plonger dans le sein de son ennemi. Tout le Conseil des Dieux peut s'assembler, tout l'Enfer peut se déchaîner; Alecton peut ennivrer tous les esprits des venins de sa rage; mais ni notre Siécle, ni un Evénement si récent, ni un ouvrage si court ne permettent guéres ces peintures, devenuës les lieux communs de la Poësie. Il faut pardonner à un Citoïen pénétré, de faire parler son coeur plus que son imagination, & l'Auteur avouë qu'il s'est plus attendri en disant:

     Tu meurs, jeune Craon, que le Ciel moins sévére
     Veille sur les destins de ton généreux frére!

que s'il avoit évoqué les Euménides, pour faire ôter la vie à un jeune Guerrier aimable.
     Il faut des Divinités dans un Poëme épique, & sur-tout quand il s'agit de Héros fabuleux. Mais ici le vrai Jupiter, le vrai Mars, c'est un Roi tranquile dans le plus grand danger, & qui hazarde sa vie pour un peuple dont il est le pere. C'est lui, c'est son fils, ce sont ceux qui ont vaincu sous lui, & non Junon & Juturne, qu'on a voulu & qu'on a dû peindre. D'ailleurs le petit nombre de ceux qui connaissent notre Poësie, savent qu'il est bien plus aisé d'intéresser le Ciel, les Enfers & la Terre à une Bataille, que de faire reconnaître & de distinguer, par des images propres & sensibles, des Carabiniers qui ont de gros Fusils raïés, des Grenadiers, des Dragons qui combattent à pied & à cheval, de parler de retranchemens faits à la hâte, d'ennemis qui s'avancent en colonne, d'exprimer enfin ce qu'on a guéres dit encore en Vers.
     C'étoit ce que pensoit M. Adisson, bon Poëte & Critique judicieux. Il emploïa dans son Poëme qui a immortalisé la Campagne d'Hochsted, beaucoup moins de fictions qu'on ne s'en est permis dans le Poëme de Fontenoy. Il savoit que le Duc de Malbouroug & le Prince Eugène, se seroient très-peu souciés de voir des Dieux, où il étoit question des grandes actions des hommes. Il savoit qu'on releve par l'invention les exploits de l'antiquité, & qu'on court risque d'affaiblir ceux des modernes par de froides allégories: il a fait mieux, il a intéressé l'Europe entiére à son action.
     Il en est à peu près de ces petits Poëmes de trois cens ou quatre cens vers sur les affaires presentes, comme d'une Tragédie; le fond doit être intéressant par lui-même, & les ornemens étrangers sont presque toujours superflus.
     On a dû spécifier les différens Corps qui ont combattu, leurs armes, leur position, l'endroit où ils ont attaqué; dire où la colonne Anglaise a pénétré; exprimer comment elle a été enfoncée par la Maison du Roi, les Carabiniers, la Gendarmerie, le Régiment de Normandie, les Irlandais, & c. Si on n'étoit pas entré dans ces détails, dont le fond est si héroïque, & qui sont cependant si difficiles à rendre, rien ne distingueroit la Bataille de Fontenoy d'avec celle de Tolbiac. M. Despréaux dans le passage du Rhin a dit:

     Revel les suit de près; sous ce Chef redouté,
     Marche des Cuirassiers l'Escadron indompté.

     On a peint ici les Carabiniers, au lieu de les appeller par leur nom, qui convient encore moins aux Vers que celui des Cuirassiers. On a même mieux aimé, dans cette derniére Edition, caractériser les fonctions de l'Etat-Major, que de mettre en Vers les noms des Officiers de ce Corps qui ont été blessés.
     Cependant on a osé appeller la Maison du Roi par son nom, sans se servir d'aucune autre image. Ce nom de Maison du roi, qui contient tant de Corps invincibles, imprime une assez grande idée, sans qu'il soit besoin d'autre figure. M. Adisson même ne l'appelle pas autrement; mais il y a encore une autre raison de l'avoir nommée, c'est la rapidité de l'action.

     Vous, peuple de Héros, dont la foule s'avance,
     Louïs, son Fils, l'Etat, l'Europe est en vos mains,
     Maison du Roi, marchez, & c.

     Si on avoit dit, la Maison du Roi marche, cette expression eut été prosaïque & languissante.
     On n'a pas voulu s'écarter un moment dans cet Ouvrage de la gravité du sujet. Despréaux, il est vrai, en traitant le passage du Rhin dans le goût de quelques-unes de ses Epitres, a joint le plaisant à l'héroïque; car après avoir dit:

     Un bruit s'épand qu'Enguien & Condé sont passés,
     Condé, dont le seul nom fait tomber les murailles,
     Force les Escadrons, & gagne les Batailles,
     Enguien, de son hymen, le seul & digne fruit, & c.

Il s'exprime ensuite ainsi:

     Bien-tôt... Mais Vurts s'oppose à l'ardeur qui m'anime,
     Finissons, il est tems, aussi-bien, si la rime
     Alloit mal-à-propos m'engager dans Arneim,
     Je n'en sai, pour sortir, de porte qu'Hildesheim.

     Les personnes qui ont paru souhaiter qu'on emploïât dans le recit de la victoire de Fontenoy quelques traits de ce stile famillier de Boileau, n'ont pas, ce me semble, assez distingué les lieux & les tems, & n'ont pas fait la différence qu'il faut faire entre une Epitre & un ouvrage d'un ton plus sérieux & plus sévére; ce qui a de la grace dans le genre épistolaire, n'en auroit point dans le genre héroïque.
     On n'en dira pas davantage sur ce qui regarde l'art & le goût, à la tête d'un ouvrage, où il s'agit des plus grands intérêts, & qui ne doit remplir l'esprit que de la gloire du Roi & du bonheur de la Patrie.

LE
POËME
DE
FONTENOY

     QUoi! du siécle passé le fameux satirique,
Aura fait retentir la trompette héroïque,
Aura chanté du Rhin les bords ensanglantés,
Ses défenseurs mourans, ses flots épouventés,
Son Dieu même en fureur effraïé du passage,
Cédant à nos Aïeux son onde & son rivage?
Et vous, quand votre Roi, dans des Plaines de sang,
Voit la mort devant lui voler de rang en rang,
Tandis que de Tournay foudroïant les murailles,
Il suspend les assauts pour courir aux Batailles,
Quand des bras de l'himen s'élançant au Trépas,
Son Fils, son digne Fils, suit de si près ses pas;
Vous, heureux par ses loix & grands par sa vaillance,
Français, vous garderiez un indigne silence?

     Venez le contempler aux Champs de Fontenoy.
O vous, Gloire, Vertu, Déesses de mon Roi,
Redoutable Bellone & Minerve chérie,
Passion des grands coeurs, amours de la Patrie,
Pour couronner Louïs prêtez-moi vos lauriers,
Enflâmez mon esprit du feu de nos Guerriers;
Peignez de leurs exploits une éternelle image:
Vous m'avez transporté sur ce sanglant rivage,
J'y vois ces Combattans que vous conduisez tous;
C'est-là ce fier Saxon (Note 1) qu'on croit né parmi nous,
Maurice qui touchant à l'infernale rive,
Rappelle pour son Roi son ame fugitive,
Et qui demande à Mars, dont il a la valeur,
De vivre encore un jour & de mourir vainqueur.
Conservez, justes cieux, ses hautes destinées,
Pour Louïs & pour nous prolongez ses années.

     Déja de la tranchée (Note 2) Harcourt est accouru,
Tout poste est assigné, tout danger est prévu;
Noailles (Note 3) pour son Roi plein d'un amour fidelle,
Voit la France en son Maître & ne regarde qu'elle.
Ce sang de tant de Rois, ce sang du grand Condé,
D'Eu, (Note 4) par qui des Français le Tonnerre est guidé,
Pentiévre (Note 5) dont le zèle avoit devancé l'âge
Qui déja vers le Mein signala son courage,
Baviére avec de Pons, Bouflers & Luxembourg,
Vont, chacun dans leur place, atendre ce grand jour;
Chacun porte la joïe aux Guerriers qu'il commande.
Le fortuné Danoy, (Note 6) Chabannes, Gallerande,
Le vaillant Berenger, ce deffenseur du Rhin,
Colbert & du Chaila, tous nos Héros enfin (Note 7),
Dans l'horreur de la nuit, dans celle du silence,
Demandent seulement que le péril commence.

     Louïs avec le jour voit briller dans les airs
Les Drapeaux menaçans de vingt Peuples divers;
Le Belge qui jadis fortuné sous nos Princes,
Vit l'abondance alors enrichir ses Provinces;
Le Batave prudent, dans l'Inde respecté,
Puissant par ses travaux & par sa liberté,
Qui long-tems opprimé par l'Autriche cruelle,
Aïant brisé son joug, s'arme aujourd'hui pour elle,
L'Hanovrien constant, qui formé pour servir,
Sait souffrir & combattre, & sur-tout obéïr;
L'Autrichien rempli de sa gloire passée,
De ses derniers Césars occupant sa pensée,
Sur tout ce Peuple altier qui voit sur tant de mers
Son commerce & sa gloire embrasser l'Univers,
Mais qui jaloux en vain des grandeurs de la France,
Croit porter dans ses mains la foudre & la balance:
Tous marchent contre nous, la Valeur les conduit,
La Haine les anime, & l'Espoir les séduit.
De l'Empire Français l'indomptable Génie,
Brave, auprès de son Roi, leur foule réunie:
Des Montagnes, des bois, des fleuves d'alentour,
Tous les Dieux allarmés sortent de leur séjour;
La fortune s'enfuit, & voit avec colére
Que sans elle aujourd'hui la Valeur va tout faire.
Le brave Cumberland, fier d'attaquer Louïs,
A déja disposé ses bataillons hardis.
Tels ne parurent point aux rives du Scamandre,
Sous ces murs si vantés que Pyrrhus mit en cendres
Ces antiques Héros qui montés sur un char
Combattoient en desordre, & marchoient au hazard:
Mais tel fut Scipion sous les murs de Carthage,
Tels son rivage & lui prudens avec courage,
Déploïant de leur art les terribles secrets,
L'un vers l'autre avancés s'admiroient de plus près.

     L'ESCAUT, les Ennemis, les remparts de la Ville,
Tout presente la mort, & Louïs est tranquille.
Cent tonnerres de bronze ont donné le signal:
D'un pas ferme & pressé, d'un front toujours égal,
S'avance vers nos rangs la profonde colonne,
Que la terreur devance, & la flâme environne,
Comme un nuage épais qui sur l'aîle des vents,
Porte l'éclair, la foudre, & la mort dans ses flancs.
Les voilà ces rivaux du grand nom de mon Maître,
Plus farouches que nous, aussi vaillans peut-être,
Encor tout orgueilleux de leurs premiers exploits:
BOURBONS! voici le tems de venger les Valois.

     Dans un ordre effraïant trois attaques formées
Sur trois terrains divers engagent les Armées:
Le Français dont Maurice a gouverné l'ardeur,
A son poste attaché joint l'Art à la valeur.
La Mort sur les deux Camps étend sa main cruelle,
Tous ses traits sont lancés, le sang coule autour d'elle.
Chefs, Officiers, Soldats, l'un sur l'autre entassés,
Sous le fer expirans, par le plomb renversés,
Poussent les derniers cris en demandant vengeance.

     GRAMMONT que signaloit sa noble impatience,
Grammont dans l'Elisée emporte la douleur
D'ignorer en mourant si son Maître est vainqueur:
De quoi lui serviront ces grands titres (Note 8) de gloire,
Ce Sceptre des Guerriers, honneur de sa mémoire,
Ce rang, ces dignités, vanités des Héros,
Que la mort avec eux précipite aux tombeaux;
Tu meurs, jeune Craon: (Note 9) Que le Ciel moins sévére
Veille sur les destins de ton généreux frére:
Hélas! cher Longaunay, (Note 10) quelle main, quel secours
Peut arrêter ton sang, & ranimer tes jours?
Ces Ministres de Mars, (Note 11) qui d'un vol si rapide
S'élançoient à la voix de leur Chef intrépide,
Sont, du plomb qui les suit, dans leur course arrêtés,
Tels que des champs de l'air tombent précipités
Des oiseaux tout sanglans palpitans sur la terre.
Le fer atteint d'Avray. (Note 12) Le jeune Daubeterre
Voit de sa légion tous les Chefs indomptés,
Sous le glaive & le feu mourans à ses côtés.
Guerriers, que Chabrillant avec Brancas rallie,
Que d'Anglais immolés vont païer votre vie!
Je te rends grace, ô Mars! Dieu de sang, Dieu cruel,
La race de Colbert, (Note 13) ce Ministre immortel,
Echape en ce carnage à ta main sanguinaire,
Guerchy (Note 14) n'est point frapé, la vertu peut te plaire.
Mais vous, brave (Note 15) Daché, quel sera votre sort?
Le Ciel sauve à son gré, donne & suspend la mort.
Infortuné Luttaux! tout chargé de blessures,
L'art qui veille à ta vie, ajoûte à tes tortures,
Tu meurs dans les tourmens; nos cris mal entendus
Te redemandent au Ciel, & déja tu n'es plus.

     O combien de vertus que la tombe dévore!
Combien de jours brillans éclipsés à l'aurore!
Que nos lauriers sanglans doivent couter de pleurs!
Ils tombent ces Héros, ils tombent ces vengeurs,
Ils meurent, & nos jours sont heureux & tranquilles;
La molle volupté, le luxe de nos Villes,
Filent ces jours sereins, ces jours que nous devons
Au sang de nos Guerriers, aux périls des Bourbons.
Couvrons du moins de fleurs ces tombes glorieuses,
Arrachons à l'oubli ces ombres vertueuses;
Vous (Note 16) qui lanciez la foudre, & qu'ont frappé ses coups,
Revivez dans nos chants quand vous mourez pour nous.

     Eh quel seroit, grand Dieu! le Citoïen barbare,
Prodigue de censure & de louange avare,
Qui peu touché des morts, & jaloux des vivans,
Leur pourroit envier mes pleurs & mon encens?
Ah! s'il est parmi nous des coeurs dont l'indolence,
Insensible aux grandeurs, aux pertes de la France,
Dédaigne de m'entendre & de m'encourager,
Réveillez-vous, ingrats, Louïs est en danger.

     Le feu qui se déploïe, & qui dans son passage,
S'anime en dévorant l'aliment de sa rage,
Les torrens débordés dans l'horreur des hyvers,
Le flux impétueux des menaçantes Mers,
Ont un cours moins rapide, ont moins de violence,
Que l'épais bataillon qui contre nous s'avance,
Qui triomphe en marchant, qui le fer à la main
A travers les mourans s'ouvre un large chemin;
Rien n'a pû l'arrêter, Mars pour lui se déclare.
Le Roi voit le malheur, le brave & le répare:
Son Fils, son seul espoir...Ah! cher Prince, arrêtez,
Où portez-vous ainsi vos pas précipités?
Conservez cette vie au monde nécessaire.
Louïs craint pour son Fils, (Note 17) le Fils craint pour son Pere,
Nos Guerriers tous sanglans frémissent pour tous deux;
Seul mouvement d'éfroi dans ces coeurs généreux.

     Vous (Note 18) qui gardez mon Roi, vous qui vengez la France,
Vous, peuple de Héros dont la foule s'avance,
Accourez, c'est à vous de fixer les destins;
Louïs, son Fils, l'Etat, l'Europe est en vos mains.
Maison du Roi marchez, assurez la victoire,
Soubise & Péquigny (Note 19) vous ménent à la gloire.
Paraissez, vieux Soldats, (Note 20) dont les bras éprouvés
Lancent de loin la mort que de près vous bravez.
Venez vaillante élite, honneur de nos Armées,
Partez, fléches de feu, grenades (Note 21) enflâmées,
Phalanges de Louïs, écrasez sous vos coups
Ces Combattans si fiers & si dignes de vous.
Richelieu, qu'en tous lieux emporte son courage,
Ardent, mais éclairé, vif à la fois & sage,
Favori de l'Amour, de Minerve & de Mars,
Richelieu (Note 22) vous appelle, il n'est plus de hazards;
Il vous appelle: Il voit d'un oeil prudent & ferme
Des succès ennemis & la cause & le terme;
Il vole, & sa vertu secondant vos grands coeurs,
Il vous marque la place où vous serez vainqueurs.

     D'un rempart de gazon, faible & promte barriére,
Que l'art oppose à peine à la fureur guerriére,
La Marke, (Note 23) Lavauguion, (Note 24) Choiseul d'un même éfort,
Arrêtent une Armée & repoussent la mort.
Dargenson qu'enflamoient les regards de son pere,
La gloire de l'Etat à tous les siens si chére,
Le danger de son Roi, le sang de ses Aïeux,
Assaillit par trois fois ce Corps audacieux,
Cette masse de feu qui semble impénétrable:
On l'arrête, il revient, ardent, infatigable;
Ainsi qu'aux premiers tems, par leurs coups redoublés,
Les béliers enfonçaient les remparts ébranlés.

     Ce brillant Escadron, (Note 25) fameux par cent batailles,
Lui, par qui Catinat fut vainqueur à Marsailles,
Arrive, voit, combat, & soutient son grand nom.
Tu suis du Chastellet, jeune Castelmoron (Note 26);
Toi, qui touches encore à l'âge de l'enfance,
Toi, qui d'un faible bras qu'affermit ta vaillance,
Reprends ces étendarts déchirés & sanglans,
Que l'orgueilleux Anglais emportoit dans ses rangs:
C'est dans ces rangs affreux que Chévrier expire;
Monaco perd son sang, & l'amour en soupire.
Anglais, sur Duguesclin deux fois tombent vos coups,
Frémissez à ce nom si funeste pour vous.

     Mais quel brillant Héros, au milieu du carnage,
Renversé, relevé, s'est ouvert un passage?
Biron, (Note 27) tels on voïait dans les plaines d'Ivry
Tels immortels Aïeux suivre le grand Henri,
Tel étoit ce Crillon, chargé d'honneurs suprêmes,
Nommé brave autrefois par les braves eux-mêmes;
Tels étoient ces d'Aumonts, ces grands Montmorencis,
Ces Créquis si vantés renaissans dans leurs fils (Note 28).
Tel se forma Turenne au grand art de la guerre,
Près d'un autre (Note 29) Saxon la terreur de la terre,
Quand la Justice & Mars, sous un autre Louïs,
Frappoient l'Aigle d'Autriche & relevoient les Lys.

     Comment ces Courtisans, doux, enjoués, aimables,
Sont-ils dans les combats des Lions indomptables?
Quel assemblage heureux de graces, de valeur!
Bouslers, Meuze, d'Ayen, Duras, bouillans d'ardeur,
A la voix de Louïs courez Troupe intrépide.
Que les Français sont grands quand leur Maître les guide!
Ils l'aiment, ils vaincront, leur Pere est avec eux.
Son courage n'est point cet instinct furieux,
Ce courroux emporté, cette valeur commune;
Maître de son esprit, il l'est de la Fortune,
Rien ne trouble ses sens, rien n'éblouït ses yeux.

     Il marche, il est semblable à ce Maître des Dieux,
Qui, frappant les Titans, & tonnant sur leurs têtes,
D'un front majestueux dirigeoit les tempêtes.
Il marche, & sous ses coups la terre au loin mugit,
L'Escaut fuit, la Mer gronde, & le Ciel s'obscurcit.
Sur un nuage épais que des antres de l'Ourse
Les vents affreux du Nord apportent dans leur course,
Les Vainqueurs des Valois descendent en courroux:
CUMBERLAND, disent-ils, nous n'espérons qu'en vous;
Courage, rassemblez vos légions altiéres;
Bataves, revenez, défendez vos barriéres;
Anglais, vous que la paix sembloit seule allarmer,
Vengez-vous d'un Héros qui daigne encor l'aimer;
Ainsi que ses bienfaits craindrez-vous sa Vaillance?
Mais ils parlent en vain, lorsque Louïs s'avance,
Leur génie est dompté, l'Anglais est abbatu,
Et la férocité (Note 30) le céde à la vertu.

     CLARE avec l'Irlandais, qu'animent nos exemples,
Venge ses Rois trahis, sa Patrie & ses Temples.
Peuple sage & fidèle, heureux Helvétiens (Note 31),
Nos antiques Amis & nos Concitoïens,
Votre marche assurée, égale, inébranlable,
Des ardens Neustriens (Note 32) suit la fougue indomptable.
Ce Danois, (Note 33) ce Héros, qui des frimats du Nord,
Par le Dieu des combats fut conduit sur ce bord,
Admire les Français qu'il est venu défendre.
Mille cris redoublez dans les airs font entendre,
Rendez-vous ou mourez, tombez sous notre éfort:
C'en est fait, & l'Anglais craint Louïs & la mort.

     Allez, brave d'Estrée, (Note 34) achevez cet ouvrage,
Enchaînez ces vaincus, échapés au carnage;
Que du Roi qu'ils bravoient ils implorent l'apui:
Ils seront fiers encore, ils n'ont cédé (Note 35) qu'à lui.

     Bien-tôt vole après eux ce Corps fier & rapide (Note 36),
Qui semblable au Dragon qu'il eut jadis pour guide,
Toûjours prêt, toûjours prompt, de pied ferme en courant,
Donne de deux combats le spectacle éfraïant.
C'est ainsi que l'on voit dans les champs des Numides,
Différemment armés des Chasseurs intrépides;
Les Coursiers écumans franchissent les guérets,
On gravit sur les monts, on borde les forêts,
Les piéges sont dressez, on attend, on s'élance,
Le javelot fend l'air, & le plomb le devance;
Les Léopards sanglans percés de coups divers,
D'affreux rugissemens font retentir les airs;
Dans le fond des forêts ils vont cacher leur rage.

     Ah! c'est assez de sang, de meurtre, de ravage,
Sur des morts entassés, c'est marcher trop longtems.
Noailles, (Note 37) ramenez vos Soldats triomphans;
Mars voit avec plaisir leurs mains victorieuses
Traîner dans nôtre Camp ces machines affreuses,
Ces foudres ennemis contre nous dirigés.
Venez lancer ces traits que leurs mains ont forgés;
Qu'ils renversent par vous les murs de cette Ville,
Du Batave indécis la barriére & l'asile,
Ces premiers (Note 38) fondemens de l'Empire des Lys,
Par les mains de mon Roi pour jamais affermis.
Déja Tournay se rend, déja Gand s'épouvente,
Charles-Quint s'en émeut; son ombre gémissante
Pousse un cri dans les airs & fuit de ce séjour,
Où pour vaincre autrefois le Ciel le mit au jour.
Il fuit; mais quel objet pour cette ombre allarmée,
Il voit ces vastes champs couverts de notre Armée,
L'Anglais deux fois vaincu, fuïant de toutes parts,
Dans les mains de Louïs laissant les étendarts,
Le Belge en vain caché dans ses Villes tremblantes;
Les murs de Gand tombés sous ses mains foudroyantes,
Et son Char de victoire en ces vastes remparts (Note 39),
Ecrasant le berceau du plus grand des Césars (Note 40).

     Français, heureux Français, peuple doux & terrible,
C'est peu qu'en vous guidant Louïs soit invincible,
C'est peu que le front calme, & la mort dans les mains,
Il ait lancé la foudre avec des yeux sereins;
C'est peu d'être vainqueur, il est modeste & tendre,
Il honore de pleurs le sang qu'il vit répandre,
Entouré des Héros qui suivirent ses pas,
Il prodigue l'éloge & ne le reçoit pas;
Il veille sur des jours hazardés pour lui plaire,
Le Monarque est un homme, & le Vainqueur un pere:
Ces captifs tout sanglans portés par nos soldats,
Par leur main triomphante arrachez au trépas,
Après ces jours de sang, d'horreur & de furie,
Ainsi qu'en leurs foïers, au sein de leur Patrie,
Des plus tendres bienfaits éprouvent les douceurs,
Consolés, secourus, servis par leurs vainqueurs.
O grandeur véritable! O victoire nouvelle!
Eh! quel coeur ulcéré d'une haine cruelle,
Quel farouche ennemi peut n'aimer pas mon Roi,
Et ne pas souhaiter d'être né sous sa Loi?
Il étendra son bras, & calmera l'Empire:
Déja Vienne se taît, déja Londres l'admire;
La Baviére confuse au bruit de ses exploits,
Gémit d'avoir quitté le protecteur des Rois;
Naples est en sûreté: la Sardaigne en allarmes;
Tous les Rois de son sang triomphent par ses armes,
Et de l'Ebre à la Seine en tous lieux on entend:
LE PLUS AIMÉ DES ROIS EST AUSSI LE PLUS GRAND.
Ah! qu'on ajoûte encore à ce titre suprême,
Ce nom si cher au monde & si cher à lui-même,
Ce prix de ces vertus qui manque à sa valeur,
Ce titre auguste & saint de Pacificateur.
Que de ces jours si beaux, de qui nos jours dépendent,
La course soit tranquile, & les bornes s'étendent.

     Ramenez ce Héros, ô vous qui l'imitez,
Guerriers qu'il vit combattre, & vaincre à ses côtez.
Les palmes dans les mains, nos peuples vous attendent,
Nos coeurs volent vers vous, nos regards vous demandent;
Vos meres, vos enfans, à vos desirs rendus,
De vos périls passés encor tout éperdus,
Vont baigner dans l'excès d'une ardente allégresse,
Vos fronts victorieux de larmes de tendresse.
Accourez, recevez à votre heureux retour,
Le prix de la Vertu presenté par l'Amour.

cul-de-lampe

Notes

     Note 1.- Le Comte Maréchal de Saxe, dangereusement malade, étoit porté dans une gondole d'osier, quand ses douleurs & sa faiblesse l'empêchoient de se tenir à cheval. Il dit au Roi, qui l'embrassa, après le gain de la Bataille, les mêmes choses qu'on lui fait penser ici.
     Note 2.- M. le Duc d'Harcourt avoit investi Tournay.
     Note 3.- Maréchal de France.
     Note 4.- Grand-Maître de l'Artillerie.
     Note 5.- Il s'étoit signalé à la Bataille de Dettingue.
     Note 6.- M. de Danoy fut retiré par sa nourrice d'une foule de morts & de mourans sur le champ de Malplaquet, deux jours après la Bataille. C'est un fait certain: cette femme vint avec un Passeport, accompagnée d'un Sergent du Régiment du Roi, dans lequel étoit alors cet Officier.
     Note 7.- Les Lieutenans-généraux chacun à leur Division.
     Note 8.- Il alloit être Maréchal de France.
     Note 9.- Dix-neuf Officiers du Régiment de Hainault ont été tués ou blessés. Son frére, le Prince de Beauveau, sert en Italie.
     Note 10.- M. de Longaunay, Colonel de nouveaux Grenadiers, mort depuis de ses blessures.
     Note 11.- Officiers de l'Etat-Major. Mrs. de Puisegur, de Meziére, de S. Sauveur, de S. Georges.
     Note 12.- Le Duc d'Avray, Colonel du Régiment de la Couronne.
     Note 13.- M. de Croissy avec ses deux enfans, & son neveu M. Duplessis-Châtillon, blessé legérement.
     Note 14.- Tous les Officiers de son Régiment Roïal des Vaisseaux hors de combat; lui seul ne fut point blessé.
     Note 15.- M. Daché (on l'écrit Dapchier) Lieutenant-Général M. de Luttaux, Lieutenant-Général, mort dans les opérations du traitement de ses blessures.
     Note 16.- M. du Brocard, Maréchal de Camp, commandant d'Artillerie.
     Note 17.- Un boulet de Canon couvrit de terre un homme entre le Roi & Monseigneur le Dauphin, & un Domestique de M. le Comte Dargenson fut atteint d'une balle de fusil derriére eux.
     Note 18.- Les Gardes, les Gendarmes, les Chevaux-Legers, les Mousquetaires, sous M. de Montesson, Lieutenant-Général. Deux Bataillons des Gardes Françaises & Suisses, &c.
     Note 19.- M. le Prince de Soubise prit sur lui de seconder M. le Comte de la Marke, dans la défense obstinée du poste d'Antoin; il alla ensuite se mettre à la tête des Gendarmes, comme M. de Péquigny à la tête des Chevaux-Legers, ce qui contribua beaucoup au gain de la Bataille.
     Note 20.- Carabiniers, Corps institué par Louïs XIV. il tire avec des Carabines raïées. On sait avec quel éloge le Roi les a nommés dans sa Lettre.
     Note 21.- Grenadiers à cheval, commandés par M. le Chevalier de Grille; ils marchent à la tête de la Maison du Roi.
     Note 22.- Un Ministre d'Etat qui n'a point quitté le Roi pendant la Bataille, a écrit ces propres mots: C'est M. de Richelieu qui a donné ce conseil, & qui l'a exécuté.
     Note 23.- M. le Comte de la Marke au poste d'Antoin.
     Note 24.- Mrs. de Lavauguion, Choiseul-Meuse, &c. aux Retranchemens faits à la hâte dans le village de Fontenoy. M. de Créqui n'étoit point à ce poste, comme on l'avoit dit d'abord, mais à la tête des Carabiniers.
     Note 25.- Quatre escadrons de la Gendarmerie arrivoient après sept heures de marche, & attaquérent.
     Note 26.- Un Cheval fougueux avoit emporté le Porte-Etendart dans la Colonne Anglaise; M. de Castelmoron, âgé de 15 ans, lui cinquiéme, alla le reprendre au milieu du Camp des Ennemis. M. de Bellet commandoit ces Escadrons de la Gendarmerie, il eut un cheval tué sous lui, aussi-bien que M. de Chiménes, en réformant une Brigade.
     Note 27.- M. le Duc de Biron eut le commandement de l'Infanterie quand M. de Luttaux fut hors de combat; il chargea successivement à la tête de presque toutes les Brigades.
     Note 28.- M. de Luxembourg, M. de Logni, & M. de Tingri.
     Note 29.- Le Duc de Saxe-Weimar, sous qui le Vicomte de Turenne fit ses premiéres Campagnes. M. de Turenne est arriére-neveu de ce grand-homme.
     Note 30.- Ce reproche de férocité ne tombe que sur le soldat, & non sur les Officiers, qui sont aussi généreux que les nôtres. On m'a écrit que lorsque la colonne Anglaise déborda Fontenoy, plusieurs soldats de ce Corps crioient, no quarter, no quarter , point de quartier.
     Note 31.- Les Régimens de Diesbak & de Betens, de Courten, &c. avec des Bataillons des Gardes Suisses.
     Note 32.- Le Régiment de Normandie, qui revenoit à la charge sur la colonne Anglaise, tandis que la Maison du Roi, la Gendarmerie, les Carabiniers, &c. fondoient sur elle.
     Note 33.- M. de Lovendal.
     Note 34.- M. le Comte d'Estrée à la tête de sa Division, & M. de Brionne à la tête de son Régiment, avoient enfoncé les Grenadiers Anglais le sabre à la main.
     Note 35.- Depuis S. Louïs, aucun Roi de France n'avoit battu les Anglais en personne en bataille rangée.
     Note 36.- On envoïa quelques Dragons à la poursuite: Ce Corps étoit commandé par M. le Duc de Chévreuse, qui s'étoit distingué au combat de Sahy, où il avoit reçu trois blessures. L'opinion la plus vraisemblable sur l'origine du mot Dragon, est qu'ils portérent un Dragon dans leurs Etendarts sous le Maréchal de Brissac, qui institua ce Corps dans les guerres du Piémont.
     Note 37.- Le Comte de Noailles attaqua de son côté la colonne d'Infanterie Anglaise avec une Brigade de Cavalerie, qui prit ensuite des Canons.
     Note 38.- Tournay, principale Ville des Français, sous la premiére Race, dans laquelle on a trouvé le Tombeau de Childéric.
     Note 39.- La Ville de Gand, soumise à Sa Majesté le 11. Juillet, après la défaite d'un Corps d'Anglais par M. du Chaila, à la tête des Brigades de Crillon & de Normandie, le Régiment de Grassin, &c.
     Note 40.- Des Césars modernes.