La Liberté, Fribourg, 14 avril 2015
On pourrait faire mieux et plus pour les Yéniches (1)
Intégration. Ce lecteur dresse l’histoire en résumé de cette population, plus ou moins nomade en Suisse. (2)
Nous confondons les Roms comme nous confondons les «Chinois» («La Liberté» du 9 avril). Pourtant il s’agit de populations différentes: Gitans, Manouches, Sintis, etc. dont le comportement reflète celui des pays d’où ils viennent. Les Yéniches sont en Suisse depuis plus d’un demi-millénaire, bien avant les cantons récemment acceptés dans la Confédération ou les nouveaux venus qui n’ont jamais pu s’adapter à nos coutumes de consensus.
Un arrêté bernois - entre autres - du XVIIIe siècle stipulait que si un Zyginer était vu on lui coupait le lobe de l’oreille, s’il réapparaissait on lui coupait l’autre oreille, à la troisième fois on le tuait. Le simple fait d’être constituait le délit! Au XXe siècle encore, on leur volait leurs enfants pour les mettre en esclavage chez des agriculteurs.
Quelques milliers de Yéniches sont restés nomades. La mobilité de ces derniers dérange certains Helvètes habitués à la stagnation - comme si le passage des goélands dérangeait les colonies de moules sur leurs bouchots.
Nous protégeons notre patrimoine: le romanche, le lys martagon, la fourmi rousse, et nous construisons des tunnels pour nos grenouilles. Nos médias hurlent quand des Etats veulent sédentariser les Touareg ou les Nenets. Et nous braconnons notre propre population nomade, laquelle représente un rare trésor ethnologique et culturel hérité du fond des âges.
En 1996, le Conseil fédéral déclarait le yéniche «langue nationale sans territoire». On pourrait faire davantage. Il y a un canton sans territoire et des institutions à inventer; cela montrerait la voie aux pays européens qui maltraitent férocement leurs nomades.
Pierre Perroud
(1) Titre de la Rédaction.
(2) Commentaire de la Rédaction.
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