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BORCHERT, Wolfgang (1921 - 1947)

 

     "C'est qui, Néron?" demanda l'enjoué avec une tête d'idiot.  "Oh, le nom n'a aucune importance. Néron, c'était quelqu'un comme vous et moi aussi. Sauf qu'il n'était pas puni pour ce qu'il faisait. Et ça, il le savait. Donc il fit strictement tout ce qu'un homme peut faire. S'il avait été facteur ou menuisier, on l'aurait pendu. Mais il se trouva qu'il était empereur, et il fit ce qui lui passait par la tête. Tout ce qui passe, comme ça, par la tête d'un homme. Voilà pour Néron."

     Wolfgang Borchert, Ce café a un goût indéfinissable (in Génération sans adieu et autres textes), Traduction Sylvie Bufala, Le Livre de Poche, édition bilingue, p. 167

     Wer ist Nero? sagte der Frühliche mit dummem Gesicht. Oh, der Name spielt keine Rolle. Nero war einer wie Sie und ich auch. Nur daβ er nicht bestraft wurde für das, was er tat. Und das wuβte er. So tat er eben alles, was ein Mensch tun kann. Wenn er Briefträger oder Tischler gewesen wäre, hätte man ihn aufgehängt. Aber er war zufällig Kaiser und tat das, was ihm einfiel. Alles, was Menschen so einfällt. Das ist der ganze Nero.

     Wolfgang Borchert, Der Kaffee ist undefinierbar (in Generation ohne Abschied und andere Texte), Le Livre de Poche, édition bilingue, p. 166

     Et nous, les bipèdes, les gens, les bêtes humaines, avec notre petit peu de jus dans les veines, avec notre petit peu de chaleur et d'os et de chair et de muscle — nous supportons ça. Notre décomposition est décidée, elle ne se laisse pas soudoyer, et: nous plantons. Notre déclin s'annonce, irrévocable, et: nous bâtissons. Notre disparition, notre dissolution, notre non-être sont certains, sont inscrits, ineffaçables — notre ne-plus-être-là est imminent, et: nous sommes. Nous sommes encore. Nous avons ce courage inconcevable: et nous sommes.
     Et le hasard, le dieu imprévisible et folâtre au-dessus de nous, le hasard, l'atroce et gigantesque hasard marche en équilibre, ivre mort, sur les toits du monde. Et sous les toits il y a nous, les insouciants, avec notre foi inconcevable.
     Quelques grammes de cerveau restent en panne, deux grammes de moelle épinière se révoltent: et nous sommes des paralytiques. Nous sommes des débiles mentaux. Raides. Pitoyables. Mais nous rions.
     Quelques battements de coeur ne viennent pas: et nous restons sans nous réveiller, sans voir le matin. Mais nous dormons — en toute assurance. Profondément, animalement confiants.
     Un muscle, un nerf, un tendon claque: nous tombons. Vertigineusement, interminablement. Mais nous conduisons, nous volons, nous chancelons en faisant les crâneurs sur les bordages des bateaux.
     Que nous soyons ainsi — qu'est-ce que c'est, dis? Que nous puissions être ainsi, que nous devions être ainsi — aucune bouche ne lâche ça.

     Wolfgang Borchert, Conversation par-dessus les toits (in Generation ohne Abschied und andere Texte), Traduction Sylvie Bufala, Le Livre de Poche, édition bilingue, p. 166

     Und wir, Zweibeiner, Leute, Menschentiere, mit unserm bißchen roten Saft, mit unserm bißchen Wärme und Knochen und Fleisch und Muskel — wir halten das aus. Unsere Verwesung ist beschlossen, unbestechliche, und: Wir pflanzen. Unser Verfall kündigt sich an, unwiderruflich, und: Wir bauen. Unser Verschwinden, unsere Auflösung, unser Nichtsein ist gewiß, ist notiert, unauslöschlich — unser Nicht-mehr-hier-Sein steht unmittelbar bevor, und: Wir sind. Wir sind noch. Wir haben den unfaßbaren Mut: Und sind.
     Und der Zufall, der unberechenbare verspielte Gott über uns, der Zufall, der grausame gewaltige Zufall balanciert betrunken auf den Dächern der Welt. Und unter den Dächern sind wir Sorglosen mit unserem unfaßbaren Glauben.
     Ein paar Gramm Gehirn versagen, zwei Gramm Rückenmark meutern: und wir sind lahm. Wir sind blöd. Steif. Elends. Aber wir lachen.
     Ein paar Herzschläge kommen nicht: Und wir bleiben ohne Erwachen, ohne Morgen. Aber wir schlafen — zuversichtlich. Tief und tierisch getrost.
     Ein Muskel, ein Nerv, eine Sehne setzt aus: Wir stürzen. Abgrundtief, endlos. Aber wir fahren, wir fliegen und schwanken breitspurig auf den Planken der Schiffe.
     Daß wir so sind — was ist das, du ? Daß wir so sein können, daß wir so sein müssen — keine Lippe gibt das frei.

     Wolfgang Borchert, Gespräch über den Dächern (in Generation ohne Abschied und andere Texte), Le Livre de Poche, édition bilingue, p. 218